D’un même cœur
Chacun de nous a sans doute fait l’expérience combien il est facile et pratique, de s’installer dans nos habitudes et nos certitudes. C’est vrai dans notre quotidien personnel, familial et professionnel, cela peut aussi s’avérer dans notre vie et notre foi chrétienne. Cela rassure, bien sûr, pour autant, tout n’est pas mauvais. Toutefois, il est toujours nécessaire de revenir à l’essentiel, à nos raisons de croire, d’espérer, d’aimer. Saint Pierre exhorte les fidèles du Christ : « Soyez prêts à tout moment à présenter une défense devant quiconque vous demande de rendre raison de l’espérance qui est en vous ; mais faites-le avec douceur et respect » (I P. 3, 15-16). Or, rendre compte avec douceur et respect de cette espérance, enracinée dans la foi et manifestée dans la charité, c’est d’abord en vivre, et prendre les moyens de ne pas se couper de ce qui en est la source vive.
A cet égard, la relecture des textes qui nous font voir vivre la première communauté des fidèles - après la Résurrection, l’Ascension et la Pentecôte - est toujours stimulante, en constatant combien les chemins empruntés et les moyens utilisés sont simples, évidents, de bon sens et par suite, à la portée de chacun. « Ils étaient assidus à l’enseignement des Apôtres et à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières. La crainte de Dieu était dans tous les cœurs à la vue des nombreux prodiges et signes accomplis par les Apôtres. Tous les croyants vivaient ensemble, et ils avaient tout en commun ; ils vendaient leurs biens et leurs possessions, et ils en partageaient le produit entre tous en fonction des besoins de chacun. Chaque jour, d’un même cœur, ils fréquentaient assidûment le Temple, ils rompaient le pain dans les maisons, ils prenaient leurs repas avec allégresse et simplicité de cœur ; ils louaient Dieu et avaient la faveur du peuple tout entier. Chaque jour, le Seigneur leur adjoignait ceux qui allaient être sauvés. » (Actes 2, 42-47).
Les quatre piliers de la foi et de la vie chrétienne, qui nous gardent fidèles au Christ Jésus, en nous gardant fidèle à l’Eglise sont l’enseignement des Apôtres, la communion fraternelle, la fraction du pain et la prière.
L’assiduité à l’enseignement des Apôtres s’enracine dans la connaissance, l’appropriation et l’approfondissement de la Parole de Dieu lue et méditée, enseignée, expliquée et transmise, mais ne s’y limite pas. En effet, l’enseignement est aussi bien celui de la parole, que celui du témoignage de vie – parfois jusqu’au martyr – de celui qui enseigne. L’un et l’autre sont inséparables. Cela nous conduit non seulement à connaître le Christ, mais à l’aimer et à le suivre. Par suite, en parole et en actes, en esprit et en vérité, chacun de nous, pour sa part et selon sa propre vocation, devient apôtre, disciple missionnaire.
La communion fraternelle est cette charité, cette unité de cœur, dépassant clivages idéologiques et humains, différences et défauts, qui nous permet de voir avec bienveillance nos frères et sœurs dans la foi, de voir en eux, et grâce à eux, Celui qui nous unit, plutôt que tout ce qui nous sépare.
Dans notre foi, dans notre vie, dans nos relations, le Christ-Jésus est au cœur. Il est le Chemin, la Vérité et la Vie. Aussi, la fidélité à la Fraction du Pain est fondamentale, vitale et essentielle, parce que dans ce sacrifice eucharistique, celui qui est notre raison de croire, d’espérer et d’aimer est là présent, se faisant reconnaître à la fraction du pain et se donnant à nous par amour. La fidélité, l’assiduité à la Fraction du Pain est fondamentale, vitale et essentielle, parce qu’en elle se réalise, se manifeste, s’accomplit notre fidélité au Christ.
Par suite, la prière, ce cœur à cœur avec Dieu, en étant la respiration de notre âme, est la respiration de toute notre vie. Adoration, louange, action de grâce, intercession, supplication... façonnée par notre vie, la prière nous permet d’être avec Dieu, de demeurer en son amour, de lui laisser sa place dans notre quotidien. Le signe de l’authenticité de notre prière est que dans cet acte d’amour, avec enthousiasme et persévérance, nous cherchons toujours plus à connaître Celui que nous voulons aimer davantage.
Toutes nos réflexions, nos idées, nos entreprises sont vaines si le Christ Jésus n’en est pas l’alpha et l’oméga, le début et commencement, la fin et l’accomplissement. Pire, cela risque d’épuiser en nous toute espérance, de décourager notre charité, et de vider notre foi. La générosité de la première communauté qui donnait à chacun selon ses besoins, avec allégresse et simplicité de cœur, au contraire nourrit l’espérance, entretien la charité et affermit la foi. En ce début d’année, que cet exemple stimulant de la première communauté chrétienne demeure devant les yeux de notre cœur.
Abbé Bruno Gerthoux, curé