A la consécration, à chaque messe, nous entendons retentir ces paroles. Elles sont une proclamation et une acclamation de ce qui s’accomplit, et par lesquelles se manifeste et s’exprime notre foi.
Nous entendons la voix du prêtre qui prononce des mots, et nous le reconnaissons. Toutefois, ces mots qu’il dit ne sont pas les siens parce que ce n’est ni son propre corps, ni son propre sang qu’il livre pour nous.
Nous entendons par la voix du prêtre, ces paroles que nous reconnaissons être celles-là même de Notre Seigneur : « prenez, ceci est mon corps… prenez, ceci est mon sang ».
Nous voyons les gestes accomplis et nous reconnaissons ceux que la Sainte-Ecriture et la Tradition nous rapportent comme étant ceux que le Seigneur lui-même a posés. Ces mots, ces gestes, nous les avons entendus et vus à la multiplication de pains, à la Sainte-Cène, sur le chemin d’Emmaüs, à nouveau, après la résurrection, au bord du lac de Thibériade. Et cependant, le cadre, les moyens, l’époque ne sont pas les mêmes.
Les conditions de temps, d’espace, de circonstances, de lieux ont changé ; nous sommes dans une église, avec une assemblée, les chants et la musique portent notre prière, des signes comme l’encens et les cierges accompagnent et orientent notre cœur, notre regard et notre cœur sont touchés par ce qu’ils voient à travers l’architecture, l’art, les ornements, les couleurs et les fleurs.
Pour autant, comme les disciples, comme les apôtres, comme la « nuée de témoins qui nous entoure » (cf. Hx 12) depuis le commencement de l’Eglise, en voyant le pain et le vin, malgré tout et grâce à tout cela, nous aussi, à notre tour, nous reconnaissons dans la foi que le Seigneur est là présent, par le Très Saint Sacrement de son Corps et de son Sang, s’offrant en sacrifice saint qui nous sauve du péché et de la mort, et se donne à nous en nourriture de vie éternelle.
Le mystère de la foi est grand ! et pour reprendre saint Paul « Ce mystère est grand : je le dis en référence au Christ et à l’Église » (cf. Eph 5, 32). Le mot de mystère peut nous induire en erreur si nous n’en faisons que le synonyme d’incompréhensible. Or, le mystère ne désigne pas une réalité incompréhensible, au contraire, mais une réalité qui dépasse ce que nos mots et nos discours seuls peuvent expliquer ; une réalité qu’il faut aussi bien regarder, écouter, toucher, et même sentir, c’est-à-dire une réalité à la compréhension de laquelle nous parvenons de tout notre être, avec tout ce que nous sommes ; une réalité qui appelle au silence et à la contemplation ; une réalité qui illumine aussi bien l’intelligence, qu’elle enflamme le cœur, et affermit la volonté. Affirmer que ce mystère de la foi est grand, c’est consentir à avancer avec toujours plus de confiance dans la foi.
« Nous annonçons ta mort, nous proclamons ta résurrection, nous attendons ta venue dans la gloire », en quelques mots nous déployons précisément ce que nous avons reçu, à travers ce que nous avons vu et entendu, à travers le témoignage de ce qui ont été témoins. De manière non-sanglante, ce qui s’est accompli par la passion et la mort de Notre Seigneur est ici annoncé et accomplit à nouveau ; à la fraction du pain, comme les disciples d’Emmaüs, nous l’avons reconnu dans la foi et nous proclamons que le Christ Jésus ressuscité est là présent au milieu de nous ; dans ce sacrifice et cette nourriture, Il nous donne ce dont nous avons besoin pour attendre son retour dans le Gloire et nous ouvrir les portes de la vie éternelle. Déjà, nous est donné tout ce que nous pouvons espérer ou attendre : le Christ Jésus Sauveur.
Tout et chaque élément, dans la célébration de la Sainte Liturgie nous conduit à tourner notre regard vers le Christ Jésus, à le chercher de tout notre cœur, à le suivre avec joie et enthousiasme, sans négliger les réalités de la terre, mais au contraire, en nous appuyant sur elles.
abbé Bruno Gerthoux, curé de Montfavet